Sciences de l’eau et des données s’allient pour déjouer les cyanobactéries
Contexte
Les cyanobactéries, ou algues bleu-vert, prolifèrent lorsque les conditions leur sont favorables : chaleur, lumière, nutriments et stagnation de l’eau. En raison du réchauffement climatique et de l’intensification des activités humaines aux abords des points d’eau, ces épisodes de prolifération sont de plus en plus fréquents et durent plus longtemps.
Problématique
Ces « fleurs d’eau » ne sont pas qu’inesthétiques; elles posent un risque bien réel, car elles libèrent des toxines dangereuses (cyanotoxines) qui peuvent affecter :
- La santé humaine : irritations cutanées, troubles digestifs, atteintes neurologiques… et parfois des intoxications graves.
- La santé animale : chaque année, des cas d’empoisonnement mortel sont recensés chez les chiens, le bétail et la faune aquatique.
- L’économie : fermetures de plages, pertes pour le tourisme, surcoûts de traitement de l’eau potable, impacts sur la pêche et l’agriculture.
- Les écosystèmes : baisse de l’oxygène dissous, hausse de la mortalité chez les poissons et autres espèces aquatiques, déséquilibres durables dans la chaîne alimentaire.
« Aujourd’hui, les méthodes classiques de suivi permettent uniquement de constater la présence de cyanobactéries une fois qu’elles sont déjà visibles. À ce stade, il est souvent trop tard pour protéger efficacement les populations, limiter les impacts économiques et préserver l’environnement. »
C’est pourquoi il devient urgent de passer d’une logique réactive à une logique prédictive.
Solution
Pour créer un outil capable d’anticiper les efflorescences de cyanobactéries, l’équipe de WaterShed Monitoring s’est tournée vers les nouvelles technologies : le recours à l’IA pour exploiter les données ouvre de nouvelles perspectives pour surveiller les ressources en eau.
Les experts en sciences de l’eau ont donc conclu un partenariat avec les data scientists du groupe SCALIAN, une firme de génie-conseil spécialisée en technologies numériques. L’objectif : développer une solution prédictive accessible qui permet aux autorités de santé publique, aux exploitants de plages et aux autres utilisateurs de plans d’eau (producteurs d’eau potable, pêcheurs, agriculteurs et éleveurs) de recevoir une alerte précoce pour ne plus être surpris par les cyanobactéries.
Ayant reçu l’appui du Centre national d’études spatiales (CNES) et de l’Agence spatiale européenne (ESA), le projet a fait l’objet d’une étude de faisabilité en 2021. Celle-ci a livré des résultats prometteurs, confirmant l’intérêt du marché et la faisabilité technologique.
Baptisée Nerthus, la solution développée mise sur l’intelligence artificielle pour extraire les informations de diverses sources de données terrestres et satellitaires. L’apprentissage par deep learning fournit ensuite un indicateur de l’éventuelle émergence d’efflorescences cyanobactériennes sur une zone géographique ciblée.
« C’est comme des prévisions météo, mais pour les cyanobactéries. En sachant quand ces bactéries risquent d’apparaître, les gestionnaires de l’eau peuvent mettre en œuvre leurs plans de protection et leurs mesures d’atténuation avant qu’il ne soit trop tard. C’est le seul moyen d’éviter l’exposition des humains et des animaux aux toxines cyanobactériennes et d’en prévenir les conséquences. »
Résultats
Depuis 2022, les équipes de WaterShed Monitoring et Scalian travaillent à l’industrialisation de Nerthus, enrichissant les modèles d’IA avec des sources de données supplémentaires pour accroître la précision et la robustesse des prédictions. En parallèle, une interface web conviviale a été développée pour que les utilisateurs puissent consulter en quelques clics les prévisions pour les plans d’eau sélectionnés.
À l’été 2025, les premiers bêtatests ont été lancés auprès de partenaires au Canada et en Europe. Ces essais grandeur nature marquent une étape essentielle : ils permettent d’évaluer la pertinence des fonctionnalités offertes, de tester l’efficacité du système en conditions réelles et de recueillir les retours des utilisateurs. Ces expériences sont précieuses, car elles contribuent à améliorer l’ergonomie de l’interface et à affiner encore les modèles prédictifs. Elles témoignent également d’un intérêt croissant de la part des acteurs concernés, qui découvrent un outil capable de transformer leur manière d’aborder la gestion des plans d’eau.
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